Ostrava l’industrielle

En mai, petit coup de fil d’un copain « Dis, t’es libre la semaine prochaine ? Pour aller en République Tchèque. Tous frais payés. ». Hum… En fait, je n’ai pas réfléchi très longtemps. Et donc, j’ai fait mon premier voyage de presse. La destination précise ? Ostrava et la région de Moravie-Silésie, tout à l’est du Pays.

Si ce bon plan est arrivé tellement à l’improviste c’est qu’il y avait eu un désistement dans le groupe de journalistes/rédacteurs web/agents de voyage. Au pied levé je suis donc partie en échange de ma prose à venir sur le séjour. Comme de bien entendu, je n’avais rien préparé et suis donc partie avec une absence totale d’a priori sur ce qui m’attendait et ce que j’allais bien pouvoir faire : le programme, dense, ne me parlait pas beaucoup je l’avoue.

Pour ne pas ménager le suspense et en venir tout de suite à la conclusion : j’ai été conquise ! Et pas juste parce que j’ai été traitée aux petits oignons par l’office de tourisme. A deux heures d’avion de Paris, c’est fou ce qu’on peut trouver de formidable et injustement méconnu ! Ostrava fait donc partie des perles dont je me demande comment je n’avais jamais eu l’idée d’aller y faire un tour. Je ne réécrirai pas tout ce que j’ai pu en dire ici : http://pvtistes.net/la-moravie-a-deux-heures-de-paris/ (ma contrepartie pour ce voyage de 4 jours). Je ne ferai pas non plus de compte-rendu détaillé type journal de bord : le rythme de nos visites et déplacements a été bien trop dense pour que je puisse être exhaustive. Je me contenterai donc de quelques impressions et photos en vrac.

Bon, déjà, me dire qu’Ostrava, tout à l’est de la République Tchèque et dont je n’avais jusque là jamais entendu parler, n’est qu’à deux heures de vol de Paris, j’ai toujours un peu de mal à en revenir (mais il est vrai que je m’émerveille encore facilement de la magie de l’avion qui permet de dîner à un coin du globe et de petit-déjeuner à l’autre bout du monde). Par contre, comme la nouvelle ligne directe Paris-Ostrava est du low cost, les horaires sont un peu des horaires alakon. Départ de Paris à 23h. Autant dire qu’il n’y avait pas beaucoup de monde pour les contrôles de sécurité.

Je n’ai pas eu le temps de me balader en long en large et en travers d’Ostrava, comme j’aime le faire d’habitude quand je visite une ville. Au fil de nos différents déplacement et quelques temps libres cependant, j’ai pu en voir quelques morceaux. La « rue de la soif » locale qui ravira les amateurs de soirées bar est plutôt dans un quartier sympa. Nous avons aperçu des rues avec des jolies maisons anciennes. Mais surtout, l’architecture socialiste domine dans les quartiers résidentiels. Bon point qui la rendrait presque sympathique : systématiquement, des beaux crépis colorés viennent égayer un peu les barres type HLM et tout ça est très arboré.

Dans les anecdotes rigolotes liées à l’ancien régime : un énorme squelette de béton. En cours de construction avons-nous naîvement cru. C’est à peu près ça, mais depuis pas loin de 20 ans en fait. Le Parti Communiste tchèque avait un projet pharaonique de siège à Ostrava. Ils ont commencé à le construire, n’ont pas pu le terminer et cette carcasse d’immeuble est donc en plan depuis la chute du rideau de fer. Ni démolie, ni construite.

Mais pour en venir à ce qui m’a réellement emballé à Ostrava, ce n’est pas la ville en elle-même, trop rapidement survolée, mais bien les vestiges industriels. Les visites des mines et des hauts fourneaux sont incroyables. Tous ces sites, fermés dans les années 90 avec la mise sur le carreau de 80 000 employés du secteur dans le bassin d’emploi, ont été très rapidement protégés au titre du patrimoine national et ouverts au public. Nous avons eu la chance de visiter Dül Michal, Landek et Dolní oblast Vítkovice, dans cet ordre là. C’est un peu comme une montée en puissance. A la mine Michal, la visite se fait en aérien, en suivant le parcours d’un mineur depuis sont arrivée, son pointage, le vestiaire, l’infirmerie, la cantine, etc. jusqu’à la mine. Tous les aspects pratiques et techniques de la vie de mineur sont évoqués. Et ça avec un temps ensoleillé et de la verdure entre les bâtiments de brique du 19ème siècle : ça a de la gueule, pas de doute !

Mais bon, la vie de mineur, ça se passe aussi un peu sous terre. Du coup, direction Landek. Là, la visite se passe dans les galeries (après un passage par les vestiaires tout de même). Bien sûr, on ne descend pas aux réelles profondeurs mais la galerie qui est quelques mètres sous terre montre tous les aspect de l’exploitation sous-terraine du charbon. La visite guidée par un mineur (26 ans de mine à son actif) a cependant quelques inconvénients : il faut supporter l’humour. Le côté graveleux passe (quoique nos accompagnatrices tchèques du jour rigolaient beaucoup que le traducteur doive traduire les détails scatologiques) mais les blagues racistes sur les roms, bien qu’elles soient probablement acceptables localement, sont nettement moins drôles. Ceci dit, la visite est instructive et il est tout à fait possible de la limiter aux aspects techniques et historiques. Le détail qui tue à la fin de la visite, c’est le petit train. Celui que les mineurs empruntaient sous terre sur des kilomètres et des kilomètres pour rejoindre leur poste de travail. Alors là, une petit boucle de chemin de fer a été construite en surface mais, pour que les visiteurs apprécient l’inconfort du mode de transport, on nous fait tourner en rond 5 à 10 minutes dans le bruit. Nous n’avions pas compris le truc avant d’embarquer, après le troisième tour on commençait à trouver ça longuet. Mais l’obectif était atteint : ils devaient bien s’emmerder les gars, plusieurs dizaines de minutes là-dedans et en plus dans les tunnels…

Mais le clou du patrimoine industriel local est sans conteste les hauts-fourneaux de Vitkovice. Un immense site qui accueillait l’ensemble du processus sidérurgique, de l’extraction du charbon à la sortie de l’acier. L’arrivée ne paie pas de mine : de la rouille partout. Mais, en fait, ce site est au coeur d’un énorme projet de réhabilitation. La citerne de gaz centrale a été reconvertie : grand hall d’accueil avec café, espaces d’expositions et, sous la coupole, salle de concert de 1500 places. Il s’agit là d’un vrai lieu de vie culturel. Nous avons fait la visite avec un ancien employé (40 de hauts-fourneaux au tableau) et même si les panneaux explicatifs sont nombreux, c’est encore une fois autre chose de se confronter à ceux qui ont vécu là-dedans, qui ont la mémoire du lieu. Les vues offertes depuis les tourelles sont aussi superbes sur les alentours et le site lui-même.

Pour parfaire la visite, l’un des bâtiments (celui de l’ancienne centrale électrique si j’ai bien compris) accueille un musée de la technique. Tout les cartels et les textes y sont en tchèque mais ça n’empêche pas d’aller y jouer comme des petits fous. Expérimentations diverses et variées se passent très bien des explications.

2 Comments

on “Ostrava l’industrielle
2 Comments on “Ostrava l’industrielle
  1. Bon, maintenant que t’es conquise, te reste plus qu’à revenir un peu plus au centre, et faire un p’tit tour à Prague :p.
    Ostrava, y’a des chansons sur elle. Comme celle-ci, très connue (localement), du célèbre (localement 😀 ) Jaromír Nohavica (http://www.youtube.com/watch?v=11cBG5Oo1lE , traduction en anglais: http://www.nohavica.cz/_en/tvorba/texty_en/t_en_kostovski.htm). Ostrava, ici, a une image très morose. Héritée de son passé industriel. Surtout de son passé lorsque l’industrie minière a périclité. Beaucoup de chomage. Ostrava, c’est là où Ludvik (personnage principal de La Plaisanterie, de Kundera) est envoyé pour faire son « service militaire forcé » une fois qu’il a été exclu du parti. Du coup, l’office du tourisme de la région, ainsi que la municipalité, ont beaucoup de pain sur la planche pour se défaire de cette image. Il y a beaucoup de festivals, dont le très connu (toujours localement) « Colours of Ostrava », un énorme festival de musique, que tu as raté de peu (c’est la semaine prochaine, je crois). Il me semble que la « Nouvelle Star Tchécoslovaque » passe aussi par Ostrava pour ses castings, et ça aussi, ça aide à redorer le blason d’une ville :).

  2. Ah, et je voulais rajouter, sur les Roms: Moi aussi ça me fait grincer des dents. Et malheureusement, le racisme contre les Roms est très ancré dans les populations tchèques. Et ce racisme entraîne un cercle vicieux pervers qui fait que malheureusement, nombre des personnes de cette communauté finissent en échec scolaire. Les parents qui n’envoient pas leurs enfants à l’école, parce qu’ils pensent que de toutes façons, vu les discriminations qu’ils subissent, ça ne sert à rien, n’utilisent pas les subventions qui leurs sont données pour acheter manuels et matériels scolaires, et après finissent avec des jeunes qui, faute d’avoir pu avoir une éducation correcte, répète le même motif à la génération suivante. Il y a des enseignants, et des écoles, qui tentent de changer les choses, de forcer les parents à envoyer leurs enfants à l’école (c’est obligatoire, mais si les parents n’envoient pas leurs gamins à l’école, l’école ne peut rien faire. Et les écoles n’osent pas faire appel aux assistantes sociale parce que la sanction pourrait n’en être que plus dure pour l’enfant). Les Roms sont un sujet très épineux dans le pays, et le « carburant » principal qui sert à fournir des voix aux partis d’extrême droite, malheureusement. Je suis sûr que ton guide aurait pu faire une visite intéressante, avec de l’humour, sans avoir besoin de se moquer des Roms au passage…

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