Vendredi, je me réveille tôt mais ne me lève qu’à 8h. Le plafond nuageux est bien gris dehors. Je prends mon petit-déjeuner tranquille, le groupe de géologistes étant parti sur le terrain tôt et ayant même laissé quelques céréales que j’ajoute à mon ordinaire. Je pars à 9h35, avec toujours cette même météo calme mais pas complètement rassurante, et fraîche.
Cependant, le sentier est un beau petit sentier rocailleux de montagne, un sentier normal, quoi, pas écossais pour deux sous. A 11h, je commence à me rapprocher du nuage. Tellement que quelques petites gouttes sonnent une alerte finalement sans conséquence. Pour un peu, je regretterais presque d’avoir oublié mes gants à la maison.
J’arrive au col de Bealach Na h-Uidhe vers midi. Le vent y souffle incroyablement fort. La vue derrière moi est splendide, celle devant est époustoufflante mais difficile d’en profiter alors que je battaille pour réussir à tenir debout. Mon couvre-sac se rempli de vent et est arraché (heureusement retenu par une ficelle). Je m’en rend compte, l’attrape pour le rouler en boule sous le bras. Puis, je réalise que depuis plusieurs jours je m’en sert avantageusement de porte carte. Alors que je viens de le rouler en boule, je n’ai pas senti la carte à l’intérieur. Et m… Quelques mètres plus loin, je vois ma carte, imprimée avec soin, glissée avec amour dans un ziploc, plaquée contre un petit rocher par le vent. J’ai comme un vague sentiment de déjà vu. Une rafale m’accompagne pour m’en approcher, je la prend et, sous un bras le couvre-sac, sous l’autre ma carte, je me décide à ne pas traîner au col et commence à redescendre derrière.
Ça souffle cependant bien fort et je passe un début de descente difficile, à essayer de ne pas être sortie du sentier malgré moi. A 13h, le vent cède la place à la pluie, au moment même où mon sentier fini et où le hors-piste commence, entre mottes d’herbe et ruisseaux multiples.
J’attends donc 14h25 et d’être arrivée au bothy de Corroul pour piquer-niquer, à l’abri. Avec un tel luxe, je m’octroie exceptionnellement une pause de 25 minutes plutôt que le quart d’heure habituel !
Le redémarrage est du coup un peu difficile, je me suis refroidie et il ne fait pas très chaud dehors. Encore une fois, je regrette presque les gants. Mais après quelques dizaines de minutes, je me suis réchauffée et suis plutôt bien finalement. On sent bien que la vue sur le Loch pourrait être superbe, c’est dommage que le brouillard et la pluie en masquent la majeure partie. Entre le hors-piste de ce matin et les bouts de sentier de cet après-midi, j’ai les pieds trempés aujourd’hui. Les dernières centaines de mètres se font en plus sur l’estran entre algues glissantes et rochers mouillés. J’arrive finalement au bothy de Glendhu à 16h25. Je mets un peu de temps mais parviens finalement à allumer un beau petit feu et m’installe en essayant notamment de faire sécher un peu mes affaires.
Je dîne vers 20h alors que dehors le vent a encore forci et qu’il pleut toujours. Les conditions météos sont tellement peu engageantes que je trouve pour mes besoins un petit récipient inutilisé que je me contente de poser dehors près de la porte du bothy pour éviter de visiter dame nature sous la pluie. A 21h30, je suis couchée prête à dormir.
Samedi matin, le réveil est plutôt difficile, il y a eu beaucoup de pluie et de vent pendant la nuit. Mon récipient pipi a valdingué plusieurs mètres plus loin, le ruisseau près du bothy a triplé de volume. A 8h30, c’est un mélange de pluie et de grêle qui tombe. A 9h30, une lueur d’espoir : ne serait-ce pas un petit coin de ciel bleu que je vois là ? En quelques minutes, il fait presque grand beau !
Mais bon, le vent glacial reste lui bien présent, faut pas déconner. Une demi-heure plus tard, ça s’est de nouveau couvert. C’est le premier matin où je pars, à 10h20, en ayant ma polaire sur le dos, sous le kway, c’est dire s’il fait frais.
Mais après quelques dizaines de minutes, dès que le sentier commence à monter en fait, je l’enlève finalement. Le contre-coup de la présence de quelques rayons de soleil est que mes allergies me font souffrir. J’essaie donc de marcher les mains dans les manches du kway, ce qui n’est pas des plus pratiques pour tenir les bâtons. Vers 11h, quelques gouttes tombent, pas longtemps. Le vent, lui, continue de souffler de façon assez constante.
J’ai décidé de ne pas suivre le (non-)sentier principal et de couper par Achfary Forest. A 13h20, j’atteins donc la route A838 et commence à la suivre. Il n’y a pas beaucoup de circulation et à 14h30 j’ai rejoint le croisement avec le sentier principal. Il pleut toujours et le vent est d’une force à empêcher de respirer, rendant parfois impossible pour quelques secondes l’avancée.
Je me trouve un endroit abrité du vent et déjeune. La visibilité est très mauvaise et les 15 kilomètres qui me resteraient à faire sur le sentier sont réputés en terrain difficile, avec quelques rivières à traverser. Vu les conditions, je ne pense pas très raisonnable de m’aventurer là-dedans et opte pour du stop. Après une demi-heure infructueuse à mon point abrité, je me décide à marcher le long de la route pour au moins avancer un peu.
Finalement, j’obtiens un lift jusque Loxford Bridge, où croise une route un peu plus importante. Lorsque je demande à mes chauffeurs s’ils ont connaissance des prévisions météo pour les jours à venir la réponse est « unsettled ». J’interpète ça comme la version politiquement correcte de « temps de chiotte ». Je marche de nouveau un peu avant d’obtenir un lift jusque Riconich, où est censé se trouver un hôtel. Il y est effectivement, mais la porte est fermée, un mec qui passe à l’intérieur m’ignore royalement et aucune indication d’ouverture n’est affichée. Du coup, je repars en décidant de pousser dès aujourd’hui jusque Kinlochbervie. Cette fois-ci, je n’ai pas à attendre le lift qui me dépose directement à la porte de l’hôtel, de façon fort sympathique. Devant la météo, je ne pense pas pouvoir camper à Sandwood Bay le lendemain et prends directement une chambre pour deux nuits. Dehors il pleut et ça souffle toujours. Je me fais mon petit dîner tranquille devant la télé, au chaud dans ma chambre.
Va falloir la lester au plomb, ta carte. Ou bien te l’accrocher au sac avec une ficelle. Deux fois de suite, ça commence à faire 😀